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Restauration de la CCN51 au 04 février 2014 : quelle évolutions ?

Le 20 février 2014, la CFE-CGC signa l’avenant de restauration du socle conventionnel de la CCN51, avec la CFDT et la CFTC, après 3 ans et 9 mois de ‘patinage’ social (mai 2010 - février 2014). Ces négociations furent majoritairement marquées par l’immobilisme de la FEHAP et l’absence d’un véritable paritarisme dans un dialogue social inédit, réalisé en comité restreint la dernière année (les CFE-CGC et CFDT ayant été finalement rejoints par la CFTC en octobre dernier). Pour la CFE-CGC, un double objectif, incontournable : rétablir un socle conventionnel digne de ce nom et extirper les salariés de la Recommandation patronale par le haut, notamment pour des cadres bien malmenés depuis l’avènement de la Recommandation patronale du 04 septembre 2012…


La FEHAP, bien installée dans sa ‘RP’, changea enfin de braquet
Très satisfaits par leur Recommandation patronale (‘RP’) de 2012 finalement agréée par le ministère et très défavorable aux salariés, les employeurs prirent leur temps. D’autant que certains d’entre eux ne l’appliquèrent que partiellement, voire pas. Un polymorphisme de pratiques parfaitement illisible dans l’univers de la FEHAP. Chemin faisant, un constat inquiétant : tout le monde sembla s’habituer à cet état de fait et s’adapter, localement, à la situation. Un fait intolérable. Les négociateurs de la CFE-CGC contribuèrent à impliquer de façon plus forte les ministères du travail et de la santé dans ce dossier. Résultat ? Depuis octobre dernier, la FEHAP, peu désireuse d’aller en commission mixte paritaire, comprit qu’il était temps de se remettre véritablement au travail et d’aboutir. De façon concomitante, la CFTC revint à la table des négociations. La CFE-CGC pu alors mener de vrais débats en regard de ses revendications : primes de technicité des cadres, cas des responsables paramédicaux, promotion, ancienneté, etc. En quatre mois, nous avançâmes plus qu’en presque quatre ans... L’Avenant du 04 février 2014 rend désormais effective la réintégration de tous les blocs thématiques antérieurs, notamment la classification des emplois, les grilles de rémunération, etc. La signature de la CFE-CGC permet de restituer 85% de la Convention collective dénoncée par les employeurs en septembre 2012 à plus de 186 000 équivalents temps-plein salariés FEHAP, dont près de 20 000 cadres. FO et la CGT, grands absents de la dernière saison de négociation, s’opposent à l’avenant de restauration conventionnelle…
 
Des marges de manœuvre très réduites mais une CFE-CGC déterminée
Le préambule de l’Avenant du 04 février 2014 précise que les avantages individuels acquis sont intégralement maintenus. Ce maintien, très coûteux pour les employeurs (3 jours féries coûtant chacun 0,45% de la masse salariale en moyenne), fit fondre comme neige au soleil la quasi-totalité de la marge de manœuvre de 2% dégagée par la mise en place de leur Recommandation patronale. Fin 2013, la FEHAP déclara n’avoir qu’une marge de 0,4%, à répartir en majeure partie entre l’ancienneté, la technicité et le salaire minimum conventionnel… La CFE-CGC veilla à ce que l’ensemble de cette maigre enveloppe ne partit pas uniquement dans les dispositions permettant de « donner de l’air » aux bas de grille salariale. Les négociateurs de la CFE-CGC sont très attachés au maintien de la hiérarchie des salaires au sein des classifications conventionnelles. Les ‘scories’ de la recommandation patronale subsistantes seront donc revisitées au fil du premier semestre 2014 (e.g : promotion, indemnité différentielle de remplacement, etc.).
 
Ce qui change avec l’Avenant de 2014 : l’ancrage de contreparties minimales trouvées sur cinq points essentiels
 
Se souvenir… La CFE-CGC ne négocie rien à la baisse. Certains – de foi discutable – ne manqueront pas de comparer les dispositions de l’Avenant de 2014 avec l’ancienne convention de 2002. Il s’est agit d’améliorer les dispositifs imposés par une recommandation du collège employeur en 2012, faisant faussement écran…
 
1. Un nouveau déroulement de carrière à l’ancienneté
La nouvelle grille améliore très sensiblement les dispositions ‘RP’ s’agissant du déroulement de carrière à l’ancienneté́ ; les premiers paliers de +1% sont étendus de la 9ème à la 12ème année ; au delà, des paliers différentiels de 2 ans remplacent la précédente incrémentation de 3 ans. La CFE-CGC a veillé, au fil de cette délicate négociation, qu’aucun ETP ne perde sur son déroulement de carrière in fine.

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2. De nouvelles modalités de calcul du complément technicité des cadres
Un vrai bras de fer. Les propositions des employeurs courant 2013, très à la baisse, étaient tout simplement inacceptables. A l’article 08.01.1, retenons l’avancée principale du dispositif : le complément de technicité des cadres décliné en cinq échelons est désormais intégré dans le calcul du salaire de base conventionnel. Il entre de fait dans les nouvelles assiettes de calcul de l’ancienneté précédemment détaillées. Ceci n’était pas le cas auparavant. Son coût ? 0,15% d’une masse salariale brute chargée FEHAP de 10,5 milliards d’euros ; rien d’irresponsable ou de dispendieux donc. La contrepartie ? Le maintien du seuil minimum de 30% de la reprise du complément de technicité à l’embauche dicté par la RP de 2012 (cf. : Art.08.03.2.2). Liberté est donnée à chacun de négocier à l’embauche, un niveau plus élevé que cette garantie plancher.

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3. Une amélioration des procédures disciplinaires
L’Avenant de février 2014 rétablit un peu de conciliation sociale et de droit à l’erreur des salariés, en renforçant le rôle des délégués syndicaux. La RP de 2012 avait radicalement supprimé les deux sanctions préalables conventionnelles en matière de licenciement ; l’Avenant en rétablit une (faute grave exceptée) et fixe par ailleurs les critères ordonnant les licenciements économiques au sein de la FEHAP.

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4. Un nouvel alignement du salaire minimum conventionnel
A compter du 1er janvier 2014, le minimum conventionnel est fixé à 1450 bruts mensuels, soit 5 euros au dessus du SMIC 2014. Une portée symbolique pour les bas salaires de la part de la FEHAP. La CFE-CGC y voit néanmoins le seul geste porté en faveur d’une politique salariale à l’arrêt. La valeur du point demeurera, cette année encore, à 4.403 €, niveau figé au 1er  décembre 2010…


5. De nouvelles modalités de passage à la retraite
Dernière avancée : les dispositions de calcul des allocations relatives à la retraite sont réintégrées au sein du socle conventionnel. Si l’allocation de mise à la retraite reprend in extenso les dispositions de la RP de 2012 (cf. : Art.15.03.2.1), celle de départ volontaire à la retraite est reconstruite sur une base de cinq échelons d’ancienneté au delà de 10 ans. La nouveauté principale réside dans la création d’une possibilité de conversion partielle de l’allocation de départ en un « temps de repos de fin de carrière », facultative et sous conditions (cf. Art.15.03.2.2.2).

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Une feuille de route de négociation pour 2014-2015...
Entre octobre 2013 et février 2014, le sens commun démontra que les grands points de blocages entre syndicats et employeurs n’eurent pu être levés. Un engagement des parties à la négociation de ces éléments sur 2014 est de facto intégré au préambule de l’Avenant dernièrement signé et envoyé à l’agrément au ministère.

Retenons les points suivants :
Renégocier de nouvelles règles en matière de promotion et de remplacement : pour la CFE-CGC, l’indemnité différentielle minimale de remplacement de +10% de la ‘RP’ doit être maintenue. En matière de promotion – thématique difficilement dissociable de la revalorisation des classifications – la CFE-CGC négociera toute disposition rétablissant plus de reconnaissance et d’équité dans le traitement social des promotions internes pour les membres de l’encadrement. 
La CFE-CGC s’inquiète de la prolifération de faisant-fonction de cadres sans reconnaissance conventionnelle et refuse la pérennisation de dispositifs « maison » d’indemnisation différentielle de ces encadrants.

Mener deux grands chantiers dès le second semestre 2014, vecteurs de consensus très délicats à construire : des dispositifs relançant une politique salariale en berne d’une part et une réforme responsable et critériée des grilles de classifications des emplois d’autre part, comprenant, pour la CFE-CGC : l’intégration des nouveaux métiers toutes catégories confondues, l’intégration de la réingénierie ‘LMD’, la correction des situations aberrantes des responsables paramédicaux en regard des cadres de santé, la situation des sages-femmes, etc. Environ deux ans de négociation à venir…
 
Aujourd’hui, un cap est passé : rétablir un ancrage conventionnel. Une route est tracée mais du chemin reste à parcourir. Pour les négociateurs de la CFE-CGC, toujours présents, il n’est pas acceptable que les droits des salariés ne soient pas protégés, ni que les récentes évolutions dans les pratiques métiers et dans les conditions de travail ne soient pas reconnues au sein du conventionnement FEHAP. D’autant que, parallèlement, se sont ouvertes les négociations relatives à la mise en place d’une complémentaire santé sous contrainte. Rendez-vous dans les prochains mois, au fil d’un dialogue social que l’on espère au bénéfice du paritarisme qui nous est cher. Seul le temps le dira, complété par un large travail de fond déjà fortement engagé.
Carpe diem.
 
Denis JAUDOIN
Négociateur CFE-CGC Santé-Social à la FEHAP